Les Français et Macron : le temps des premières questions(20/08/2017)

Emmanuel Macron, « vrai chef » ou président « caporaliste » ? La question de l’autorité divise l’opinion. L’institut BVA a recueilli les paroles de Français, Adrien Abecassis, l’ex- »monsieur opinion » de François Hollande, les décortique.
Adrien Abecassis et Adélaïde Zulfikarpasic Publié le 20 août 2017 à 08:30
Une analyse d’Adrien Abecassis, expert associé à la Fondation Jean Jaurès, diplomate et ancien conseiller opinion de François Hollande à l’Elysée. Avec Adélaïde Zulfikarpasic, directrice de BVA opinion.
Cent jours après la prise de fonction du président, les réactions des Français se précisent : on voit de moins en moins de « j’attends de voir » et de « il faut lui donner sa chance », comme si les jugements commençaient à se former.
L’avis des Français est pour autant très loin d’être définitif. S’ouvre plutôt un « temps des questions », comme si l’opinion commençait à regarder d’un peu plus près certains traits de cette nouvelle présidence afin de commencer à se déterminer plus précisément.
Le « sursis bienveillant » qui s’est ouvert après l’élection (et dont nous parlions au mois de mai) prend ainsi progressivement fin ; et l’on voit les Français commencer à soupeser les éléments à la lumière de ces premiers mois pour juger de l’issue à donner à ce sursis… Cela prendra encore quelques temps (la justice des Français n’est pas expéditive !), mais le processus semble assurément lancé.
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Et, portée par l’actualité, c’est la question de « l’autorité » qui émerge parmi ces premiers éléments examinés de plus près. Que nous disent les Français ?
« Un vrai chef »
Il faut rappeler que l’opinion est très loin d’être rétive à l’affirmation, forte si nécessaire, d’une l’autorité politique, d’un chef. Ainsi, interrogés en juin dernier peu après l’élection d’Emmanuel Macron, 88% des Français estimaient que « l’on a besoin d’un vrai chef pour remettre de l’ordre » et 84% que « l’autorité est une valeur trop souvent critiquée » (Ipsos pour la Fondation Jean-Jaurès et « Le Monde »). Il y avait donc plus qu’une bénévolence : une réelle attente de reprise en main.
C’est aussi ce que nous disent, avec leurs mots, les nombreux Français interrogés par BVA pour Orange- »La Tribune ». Beaucoup portent encore au crédit d’Emmanuel Macron le fait de faire preuve de « volonté et d’autorité », d’avoir « l’air de savoir ce qu’il veut faire et de s’y tenir », ou encore
« d’assumer ses promesses de campagne avec une certaine autorité ».
Parmi les gens qui voulaient un « chef », une bonne partie d’entre eux apprécient ainsi ces postures de fermeté :
« Il réunit ce qu’on demande d’un chef : il a l’autorité, il paraît avoir une certaine vision de l’avenir, semble tenir ses troupes. »
« Tenir ses troupes », comme un attribut exigé du chef de l’Etat : c’est ce qui peut expliquer les réactions plus distantes sur les derniers événements d’une opinion moins au fait des questions militaires.
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Mais l’on voit aussi apparaître, et cela est nouveau, des jugements plus négatifs – qui se transforment parfois en franche critique :
« Son côté Jupitérien commence à m’exaspérer. »
« Il fait petit chef », « autocrate. »
« On dirait qu’il veut se prendre pour un dictateur en herbe. »
Le sursis ne tombe pas toujours du même côté. Comment comprendre ces représentations opposées ? Sur quoi s’appuient-elles, et pourquoi tombent-elles d’un côté ou de l’autre ?
Autorité légitime ou caprice ?
Là encore, ce que nous disent les paroles rapportées par BVA est extrêmement éclairant. La question sous-jacente paraît être : vers quoi cette autorité est-elle dirigée ?
Les Français qui voient cette autorité tournée vers un objectif juste ou nécessaire (pour dépasser des obstacles ou des réticences par exemple) l’applaudissent :
« Il est ferme, pour le moment il tient ses engagements », dit l’un.
« Il fait ce qu’il dit et il dit ce qu’il fait », dit l’autre.
« Il agit, met en place des vraies réformes là où les autres étaient incapables de changement ». « Il fonce ! ».
Cette autorité-là n’est pas vue comme tournée vers elle-même (exercice du pouvoir autocentré et solitaire) mais exercée au nom des Français pour respecter les engagements pris devant eux. Elle est donc, à leurs yeux, parfaitement légitime.
C’est tout l’inverse pour ceux qui voient l’autorité exercée par le président non pas dans le but de réaliser ce que les Français lui ont confié, mais de faire « ce qu’il veut ». Dans ce cas-là, problème…
« Il donne dans le caporalisme et réagit comme un enfant capricieux ! »
Les mots utilisés sont significatifs : parler de « caprice », c’est bien renvoyer à sa seule volonté et non à celle du peuple français. Or le président ne tient son pouvoir que parce que les Français le lui ont confié à travers l’élection directe… et ils en sont parfaitement conscients. Le président ne peut donc, à leurs yeux, s’en éloigner, ni prétendre exercer une autorité « autonome » d’eux.
« Être chef d’État ne signifie pas devenir dieu ! », lit-on dans un raccourci qui condense parfaitement cela, « diriger un Etat demande plus qu’un sentiment de toute puissance, ça demande d’écouter la population. »
Il n’y a pas de légitimité extérieure au peuple, ce sont les gens qui ont le pouvoir et ils le savent : le président peut donc être autoritaire – et doit même l’être – avec ce qui peut gêner son action légitime, mais jamais avec le peuple français ; et ce pouvoir doit toujours paraître exercé au nom de ces mêmes Français (commanditaires ultimes!), car dès qu’il leur paraît exercé de façon autonome, il est rejeté… ce qui est, après tout, rassurant sur la vitalité de la Nation et ses réflexes démocratiques solidement ancrés !
La plupart des verbatims critiquant l’exercice du pouvoir tournent ainsi autour de cette notion :
« Je le trouve narcissique, autoritaire, il ne me paraît pas à l’écoute des petites gens. »
L’écoute, ou plutôt le « manque d’écoute » qui revient à plusieurs reprises, est une autre façon d’exprimer la même idée : le souverain est l’émanation du peuple et doit donc sans cesse l’écouter, être au milieu d’eux, savoir partager lorsqu’il le faut leur quotidien ; à l’inverse le souverain seul en son palais touché par l’enfermement ou de déconnexion, devient dévoyé dans notre imaginaire politique.
Mais comment être vraiment le président de « tous » les Français ? C’était la question que se posaient déjà les gens interrogés par BVA au mois de juin.

L’OBS

Publié dans : MACRON |le 20 août, 2017 |Pas de Commentaires »

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