On n’a peut-être pas assez souligné les résultats de l’étude réalisée par l’OFCE, think tank keynésien (plutôt de gauche, mais aussi sérieux et précis dans le maniement des chiffres). Il en ressort une chose très simple : l’étiquette de «président des riches» accolée de manière polémique à Emmanuel Macron au début du quinquennat correspond bien au contenu du flacon.
Analysant sur deux ans l’effet des décisions fiscales et budgétaires arrêtées par le gouvernement Philippe, l’OFCE montre qu’une grande partie des douceurs sonnantes et trébuchantes dispensées par l’Etat depuis 2017 est allée aux plus aisés, tandis que les réformes du logement et des allocations chômage ont fait diminuer le revenu des Français les plus défavorisés (de 5%). Ainsi le «ruissellement», qui est censé justifier les politiques libérales, a bien eu lieu. Mais à l’envers. Selon un phénomène gravitationnel étrange, l’argent a ruisselé… vers le haut, ce qui surprendra les physiciens, mais pas les économistes habitués à examiner l’effet des médications libérales administrées dans les grands pays depuis la «révolution conservatrice» des années 80. Les «premiers de cordée» célébrés par le régime ont obtenu les récompenses qui s’attachent à leur statut. Les autres ont dû, en proportion, serrer un peu plus autour de leur taille, à la manière d’une ceinture, la corde censée les relier à leurs compatriotes.
Une nouvelle fois, s’il en était besoin, on perçoit la différence qui sépare les politiques de gauche des politiques de droite. Sous Hollande, dans une mesure modérée mais très réelle, les inégalités évaluées par le fameux coefficient de Gini s’étaient réduites. Elles s’accroissent ensuite. Ainsi le «nouveau monde» promu par la macronie est plus inégalitaire que l’ancien. Ainsi le «néisme» (la passion de la nouveauté) n’est pas toujours synonyme de progrès social.
Les accusés se défendront en soulignant que l’emploi, en compensation, s’est amélioré et que le chômage a connu une décrue lente mais significative. Chose incontestable. Mais là encore, les chiffres nous éclairent. Un lecteur attentif de cette lettre, Jean-Marie Battiston, banquier de philosophie libérale, mais lui aussi précis dans ses analyses, nous a fait remarquer que le redressement de l’emploi a commencé avant l’élection d’Emmanuel Macron, dès le milieu de l’année 2016, même s’il est survenu trop tard pour permettre à l’ancien président de se représenter.
Paradoxe : l’un des protagonistes de ce redressement, alors ministre de l’Economie, s’appelait Emmanuel Macron. La conclusion s’impose d’elle-même : à la faveur de l’élection présidentielle, la chrysalide de centre gauche est devenue un papillon de droite.
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